
Après la période troublée de la pandémie, une nouvelle manière de voyager s’impose avec éclat : le retour en force de la vanlife. Le voyage en van, souvent considéré comme une échappatoire authentique et une invitation à la liberté, séduit une clientèle diverse et passionnée. Au cœur des routes françaises et européennes, cette tendance s’affirme comme une réponse à la quête de nature, de flexibilité et d’évasion. Les véhicules de loisirs, notamment les vans et camping-cars, ont connu une croissance non seulement en popularité mais aussi dans leur sophistication, transformant le paysage du tourisme itinérant. Pour les passionnés comme pour les novices, le phénomène est plus qu’une mode ; il symbolise une redéfinition du voyage en phase avec les aspirations post-COVID.
L’explosion du marché du voyage en van en France et en Europe
Depuis la fin des restrictions liées à la pandémie, la demande pour les voyages en véhicules de loisirs s’est intensifiée de manière significative. En France, l’appétit pour la vanlife reste vif et traduit un véritable engouement pour ce mode de déplacement. Selon UNI VDL, le syndicat des véhicules de loisirs, les immatriculations de vans et de camping-cars ont continué à croître en 2024 avec plus de 26 000 véhicules neufs enregistrés sur le territoire français. Ce chiffre, bien que loin derrière le géant allemand qui demeure le leader européen avec près de 68 000 unités pour l’année écoulée, démontre néanmoins la position solide qu’occupe la France dans ce marché en pleine effervescence.
En Europe, la croissance générale du marché est évaluée à près de 10% en 2024, avec un total combiné supérieur à 160 000 véhicules de loisirs neufs. Ce succès s’explique à la fois par la diversification de l’offre, mais aussi par la démocratisation progressive des véhicules de loisirs. Des marques bien connues comme Volkswagen, Renault, Ford ou Mercedes-Benz ont développé des gammes adaptées, allant des fourgons compacts aménagés aux véritables maisons roulantes, ce qui facilite l’accès à un public large et varié.
L’engouement se traduit par un usage très régulier, où certains adeptes utilisent leur camping-car ou van aménagé comme résidence principale temporaire ou base mobile pour le travail en télétravail. Cette tendance reflète un changement profond des modes de vie et du rapport au voyage, où la liberté et la proximité avec la nature reprennent une place essentielle. Le phénomène « vanlife » touche désormais toutes les classes d’âge, touchant jeunes actifs, familles et retraités.
La montée du slow tourisme et son impact sur le marché des véhicules de loisirs
Avec la pandémie, les modes de voyage ont évolué. Le slow tourisme, ou tourisme lent, a conquis les voyageurs en quête d’authenticité et de sérénité. Ce concept valorise la découverte en prenant le temps, en privilégiant les destinations locales et en réduisant l’empreinte écologique. Le voyage en van s’intègre parfaitement dans cette philosophie, offrant mobilité et autonomie pour s’imprégner des territoires en profondeur.
Les professionnels du secteur confirment que les profils des voyageurs ont changé : les séjours se font plus longs et plus responsables, dans des espaces naturels comme les littoraux ou les massifs montagneux. En 2024, les campings nationaux ont enregistré environ 140 millions de nuitées, stabilité confirmée par l’Observatoire du tourisme. Parmi ces nuitées, près de 1,2 million se répartissent chez les utilisateurs de véhicules de loisirs en plein été, une hausse notable de 24% par rapport à l’an passé.
Les destinations favorites restent la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie et la région Auvergne-Rhône-Alpes, plébiscitées pour leurs paysages variés et leur accès à la mer et à la montagne. Ces régions, en plus de leur charme, bénéficient d’infrastructures adaptées, avec des aires de stationnement sécurisées et des services dédiés au confort des voyageurs en van.
De l’esprit roots à l’embourgeoisement : l’évolution du lifestyle vanlife
La vanlife, longtemps associée à un style de vie minimaliste et à la quête d’une liberté sans contraintes, a connu une évolution majeure au fil des décennies. Son origine remonte aux années 1970 avec le mouvement hippie et les cultes du Combi Volkswagen, incarnation du voyage alternatif. Puis, dans les années 1990, l’essor du camping-car a intégré cette dynamique sous une forme plus confortable et familière.
La tendance s’est véritablement amplifiée avec l’avènement des réseaux sociaux, où l’image du van aménagé devient vecteur d’un rêve d’évasion. Les comptes spécialisés, comme celui de Three Vanlifers, ont popularisé cette pratique en partageant leurs périples à travers l’Europe dès 2016. Le succès sur Instagram et TikTok a converti des milliers d’adeptes qui aspirent à vivre cette aventure.
Cependant, cette popularité a aussi modifié la nature même de la vanlife. Le marché s’est embourgeoisé avec une montée en gamme des véhicules allant de pair avec l’augmentation sensible des prix, parfois de plus 10 000 euros en deux ans. Des marques comme Mercedes-Benz, Westfalia ou Campérêve proposent désormais des modèles haut de gamme, offrant des finitions luxueuses et un confort presque domestique.
Face à cette évolution, une ambivalence se fait jour au sein de la communauté. Certains revendiquent encore un esprit plus simple, axé sur la débrouille et le contact direct avec la nature. D’autres privilégient désormais un véhicule aussi esthétique que fonctionnel, où la décoration et l’aménagement intérieur rivalisent avec le mobilier d’un appartement. Ce glissement du « roots » vers un produit de standing modifie les récits et les expériences. Les vans deviennent des images de marque, mettant en scène des paysages idylliques qui suscitent l’envie mais masquent parfois les difficultés vécues sur la route, comme les nuits improvisées ou les douches froides.
Jessica Ledoult, entrepreneuse en aménagement à Dinan, exprime son point de vue critique : « Certains s’imaginent que c’est la vie de rêve. Mais vivre en van, c’est aussi gérer les galères, les espaces réduits et la météo capricieuse ». Elle conseille d’ailleurs vivement aux intéressés de commencer par louer un van avant d’investir plusieurs dizaines de milliers d’euros. Ce test est crucial pour appréhender la réalité d’un mode de vie nomade.
Des modèles variés pour répondre à toutes les attentes
Le marché propose aujourd’hui une large gamme de véhicules répondant à tous les besoins. Des véhicules compacts basés sur des fourgons Peugeot ou Citroën, aux grands camping-cars Mercedes-Benz, en passant par les vans emblématiques Volkswagen aménagés par Westfalia. Les loueurs comme Roadsurfer et WeVan facilitent également l’accès à ce univers sans investissement lourd.
Impacts économiques et sociaux du boom du voyage en van post-COVID
Le retour massif à la vanlife a des répercussions significatives sur le plan économique. En 2024, le secteur du véhicule de loisirs a engrangé plusieurs milliards d’euros, avec une participation notable au tourisme local, notamment en zones rurales et littorales. Cette demande a stimulé la création d’emplois dans la vente, l’aménagement et la location des véhicules, mais aussi dans le secteur des campings et des services associés.
Sur le terrain, la fréquentation accrue des campings a parfois entraîné des problématiques d’équipement et de gestion. Pour répondre à ces défis, des collectivités locales investissent dans l’amélioration des infrastructures, permettant un accès facilité pour les camping-cars et vans. Ces efforts contribuent à l’attractivité touristique des territoires et à une meilleure répartition des visiteurs, évitant les zones de surfréquentation classiques.
Par ailleurs, ce phénomène accentue également des dynamiques sociales, en proposant une alternative aux modes de vie traditionnels souvent perçus comme contraignants. La vanlife incarne un changement générationnel dans la manière de concevoir le logement, la mobilité et le travail, favorisant la flexibilité et la quête de sens.
Les nombreux témoignages recueillis lors du salon Vanlife Expo à Rennes illustrent cette complexité. Les participants évoquent souvent un besoin de déconnexion, un désir de ralentir et de renouer avec un rythme de vie plus naturel. Pour d’autres, le voyage itinérant est devenu une réponse aux tensions urbaines, une manière de se recentrer tout en continuant à explorer de nouveaux horizons.
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